Archives du blog

lundi 15 septembre 2025

 Les Ornais tombés à Austerlitz

   Napoléon à la bataille d'Austerlitz par François Gérard, Musée du Trianon    

© Agence photographique de la Réunion des musées nationaux

Le 11 frimaire an 14 (2 décembre 1805) par un froid glacial et sous un soleil éclatant, le fameux soleil d’Austerlitz, Napoléon et ses troupes remportèrent leur plus célèbre victoire. La bataille mit aux prises quelques 65 000 soldats de l’Empire face à environ 100 000 soldats russes et autrichiens. Les combats se déroulèrent entre Brünn (Brno) et Austerlitz dans le sud de la Moravie (alors une possession autrichienne aujourd'hui en Tchéquie).

Si la victoire fut éclatante pour les troupes napoléoniennes, l'affrontement n’en fit pas moins un certain nombre de morts dans leurs rangs. En mars 1807, le Conseiller d'Etat Daru, intendant général de la Grande Armée, adressa au préfet de l’Orne une liste de dix-neuf victimes originaires de son département que voici :

Morts le 11 frimaire an 14, sur le champ de bataille :

Henri Chaignard, chasseur au 13e  régiment d'infanterie légère ;
Louis-Gabriel Lanac (dit Naul), 14e  régiment de ligne ;
Jean Tellier, voltigeur, 31e régiment de ligne ;
Jean Bernard, et Julien Foucaudel, 36e régiment de ligne ;
Louis Balais, grenadier au 43e régiment de Ligne ;
Louis-Marin Bouvier, J.-Clément Chatellier, Antoine Rey, André Corbière, du 46e régiment de ligne ;
Pierre Nory-Duparc, sergent du 64e régiment de ligne ;
Nicolas Dumesnil, dragon au 15e régiment.

Morts des suites de leurs blessures :

Jean-François Thébaud, capitaine au 43e régiment de ligne, mort le 26 frimaire ;
Jacques-François Noël, fusilier au 43e régiment de ligne, date de décès inconnue ;
François Dorbec, 46e régiment de ligne, mort le 26 nivôse ;
Jérôme Robine, voltigeur au 46e régiment de ligne, mort le 12 frimaire, le lendemain de la bataille ;
Jacques Maurice Gobey, 46e régiment de ligne, date de décès inconnue ;
Simon Bouvet, brigadier au 5e régiment de dragons, date de décès inconnue ;
Casimir Rebours, sous-lieutenant au 22e régiment de dragons.

Dans son courrier au Préfet, Daru indiquait également que par un décret impérial du 16 frimaire an 14, l'Empereur avait adopté les enfants des vainqueurs morts à Austerlitz ou des suites des blessures qu'ils y avaient reçues. Et qu’en conséquence, deux maisons d'éducation avaient été créées pour les accueillir suivant leur sexe.

Source : Journal du département de l’Orne, n° 37 du 8 mars 1807.


Compléments biographiques concernant les victimes 

Julien Foucaudel, fils de Robert Foucaudel, filassier, et de Marie Niaux, était natif du Ménil-de-Briouze. Il avait trente-neuf ans passés, ce qui est relativement âgé pour un soldat à l'époque. A Austerlitz, il tenait le rôle de fusilier dans la 4e Cie, 1er bataillon du 36e régiment de lignes. Son acte de décès est transcrit dans le registre de sa commune natale.

Louis-Marin Bouvier, né le 20 juillet 1783 à Saint-Wandrille (aujourd’hui commune de Planches) fut orphelin dès l’âge de 2 ans après le décès de son père en janvier 1784 et celui de sa mère en août 1785. Il n’a pas eu de descendance.

André Corbière, natif de Champsecret, était le fils d’un sabotier. Il avait alors vingt-deux ans et était soldat à la compagnie des voltigeurs du 2e bataillon. Son acte de décès est transcrit dans le registre d’état-civil de la commune de Champsecret. Il n’a pas eu de descendance.

François Dorbec né à Saint-Maurice-lès-Charencey en novembre 1782, était le fils de François Dorbec, charpentier, et de Marie Charlotte Bisson. Il était soldat depuis près de deux ans au moment de la bataille. Il est décédé à l'hôpital de Brünn suite aux blessures reçues lors des combats. Son acte de décès transcrit dans le registre de Saint-Maurice mentionne la date du 26 frimaire, soit quinze jours après la bataille, et non le 26 nivôse comme il est rapporté dans la liste de Daru.

Pour d'autres soldats nous n'avons pas trouvé de transcription d'actes de décès. En revanche des actes de naissance de personnes ayant les mêmes prénoms et noms figurent dans les registres paroissiaux. Et il semble assez probable qu’il s’agisse des hommes morts à Austerlitz, ainsi :

 

Jean Clément Chatellier né le 25 novembre 1883 à Argentan, paroisse Saint-Martin de Mauvaisville, fils de Charles Chatellier, meunier, et de Jeanne Simon.

Jérôme Robine né le 30 mars 1784 à Bray (commune fusionnée à Mortrée en 1794), fils de Jean Jérôme Robine, laboureur, et de Marie Jeanne Goupil.

Casimir Rebours né le 27 février 1779 à Bellême, paroisse Saint-Pierre, fils de Pierre Joseph Rebours, procureur au grenier à sel de Bellême, et de Jeanne Marguerite Jacquine de Brisard.

Environ un an et demi avant la bataille d’Austerlitz, Casimir Rebours s’était distingué dans l'affaire de l’enlèvement du duc d'Enghien. C'était le 15 mars 1804. Ce jour-là Louis Antoine de Bourbon-Condé, duc d'Enghien, petit-fils du prince de Condé, lié aux émigrés royalistes et soupçonné d'implication dans la conspiration de Georges Cadoudal, fut enlevé sur le territoire de l'électorat de Bade à la suite d'une opération de la police secrète dirigée par Savary et menée par le général Ordener. Pour se faire, un détachement d'un millier d'hommes du 22e régiment de dragons avait franchi le Rhin à Rhinau, s'était dirigé vers Ettenheim, à dix kilomètres de la frontière, et avait enlevé le duc. Au cours de cet épisode, Casimir Rebours, qui était déjà sous-lieutenant au 22e dragons, refusa une offre d'un million de la part du duc "pour transiger avec ses devoirs". Cette loyauté lui valut d’être proposé pour la Légion d’honneur. Malheureusement pour Rebours, Austerlitz vint briser sa carrière avant qu'il reçoive la décoration.

Sources : 

Jean Tulard, « L'assassinat du Duc d'Enghien », émission Au cœur de l'histoire sur Europe 1, 11 septembre 2012.
Joseph Durieux, autour du Duc d'Enghien, Revue des études historiques, avril-juin 1935, pp 171-173.
Revue des Etudes Napoléoniennes, 1er juillet 1935, page 254.

 

Chers lectrices et lecteurs, des recherches concernant les victimes sont toujours en cours. Si l'une ou l'un d'entre vous a des informations qui permettraient de compléter je vous invite à les proposer en écrivant un commentaire. 

Merci d'avance de votre collaboration. 

Gilbert Cholet