Louis Charles d'AVESGO de MONTCHEVREL
En 1782, officier au régiment Royal dragons[1]
La famille d'Avesgo anoblie à la fin du XVe siècle
Les membres de la famille d'Avesgo exercèrent des fonctions dans la magistrature depuis au moins le XVe siècle et furent à la tête de quelques seigneuries de la Généralité d’Alençon. A l’origine leur nom est simplement Avesgo. La particule dite « nobiliaire » a été adoptée au début du XVIIe siècle, comme ce fut le cas pour de nombreuses familles nobles qui marquaient de cette façon la propriété d'une seigneurie. L'acte le plus ancien que nous ayons rencontré avec le nom précédé de la particule concerne le traité de mariage de Marie d'Avesgo avec Robert Le Vennier le 24 janvier 1605 à Alençon. A partir de ce moment-là, en plus de la particule le nom va être alors très souvent suivi, selon les branches, d’un complément géographique : ‘d’Ouilly’, ‘de Coulonges’, ‘de Montchevrel’, etc.
d’Avesgo de Coulonges
D'azur à la fasce écotée d'or accompagnée de trois gerbes du même
à la bordure de gueules chargée de huit besans d'argent.
Il ne reste
aujourd’hui aucun descendant portant le nom d'Avesgo. En effet le
patronyme s’est éteint côté homme avec le comte Louis Marie Antoine d'Avesgo décédé
le 17 décembre 1885 au château de Coulonges-sur-Sarthe, qui n’eut que des
filles. Ce Louis Marie Antoine fut maire de Coulonges-sur-Sarthe de 1847
jusqu’à sa mort, et conseiller général de l’Orne de 1848 à 1855. Quant à la
dernière femme née d’Avesgo, Louise Marie Caroline, fille du précédent et
épouse de Théodule Mouchet de Battefort de Laubespin, elle mourut le 25 janvier
1952 au château de Freÿr, à Hastière en Belgique.
Cette famille appartenait à la noblesse depuis la fin du XVe siècle. Une collation[2] des lettres patentes de l’anoblissement d’André Avesgo du Vaheureux, réalisée en 1666, est conservée aux Archives départementales du Calvados[3]. Une copie figure également dans les Dossiers généalogiques d'Ambroise-Louis-Marie d'Hozier conservés au département des manuscrits de la BNF. Il est question de ‘lettres accordées par la Roi à André Avesgo, au mois de nov. 1482, par lesquelles sa Majesté en considération de son mérite l’annoblit lui et sa postérité, de l’un et de l’autre sexe, née et à naître en légitime mariage, et leur permet de jouir à l’avenir de tous les privilèges dont avoient coutume de jouir les autres nobles du Royaume. Lettres données au Plessis-lez-Tours, signées Louis, scellées en lays de soies sur cire verte, et expédiées à la Chambre des Comptes à Paris’[4]. L’appartenance à la noblesse fut confirmée par l’intendant Bernard de Marle[5] dans un jugement rendu le 1er août 1668 par lequel il maintenait René d’Avesgo, sieur de St-Jacques, et son fils Maurice, comme issus d’André anobli en 1482[6].
Mais André Avesgo n’avait semble-t-il pas attendu les lettres patentes de novembre 1482 pour se considérer comme noble. Car dans un document conservé également au cabinet des titres de la BNF (Carré d’Hozier) on trouve la transcription d’une pièce écrite datée du 14 mars précédent concernant un échange de terre entre un dénommé Robert Jonneault et André Avesgo, où ce dernier est déjà qualifié ‘écuyer’.
Plus d’un demi-siècle après l’anoblissement, les choses ne semblaient cependant pas acceptées par tout le monde, puisque André Avesgo, sieur de Beaufour, dût engager un procès, qu’il gagna en 1551, contre les paroissiens d’Écorches qui voulaient le taxer pour la Taille, impôt dont étaient exemptés les nobles. De même que l’année d’avant, lui et son fils s’étaient vus réclamer 120 Livres Tournois au titre du droit des francs-fiefs pour leur terre de Beaufour à Écorches. Cet impôt particulier existait depuis longtemps et visait les roturiers qui possédaient des biens nobles. Mais au vu de la charte de 1482 qu’ils produisirent alors devant la justice, ils en furent aussi exemptés[7].
Dans les généalogies rédigées au XIXe siècle, l'origine de la noblesse des Avesgo est de même discutée. Pour Edouard de Magny, qui dit pourtant s’appuyer sur les généalogies de la branche de Coulonges établies un siècle auparavant par Charles d’Hozier de Sérigny et par le président d’Hozier, « La noblesse d’ancienne chevalerie de la Maison d’Avesgo est suffisamment attestée par la mention qui en est faite dans la recherche de Monfaut, en 1463, ce qui constate authentiquement son origine jusqu’au XIIIe siècle »[8]. Une date contestée par Gustave Chaix d'Est-d'Ange[9], pour qui l’anoblissement intervient un peu plus tard par lettres patentes du roi Louis XI. Selon Victor des Diguères[10] cet anoblissement résultait probablement de l'édit des francs-fiefs de 1470 (voir chapitre en fin de texte concernant les anoblissements).
A propos d’André Avesgo, anobli en 1482, Chaix d’Est-d’Ange ajoute qu’il était « le fils présumé d’un autre André, et le mari de Chardine Chuppin, résidant en l'élection d'Argentan ». ‘Présumé’ signifie pour nous qu’il faut sans doute considérer avec précaution l’ascendance de ce personnage ; quant au nom de son épouse, d’autres sources donnent Claudine Chopin. Il s’agit peut-être là seulement d’une simple variante orthographique, telle qu’on en rencontre assez souvent pour l’époque. En tout cas, la présence du patronyme Chopin est avérée dans les registres paroissiaux d’Argentan de la fin du XVe siècle[11], de même que celle du prénom Chardine, alors que Chuppin et Claudine en sont absents.
Des Avesgo tabellions
Parmi les Avesgo qui n’apparaissent pas comme ayant été nobles, mais néanmoins ont laissé quelques traces, citons un certain Philippot Avesgo qui fut tabellion. Dans un document provenant de d’Hozier, il aurait exercé en la vicomté de Falaise, au siège de Vrigny, en septembre 1475[12]. Gilles-André de La Roque dit lui, qu’en 1484, un ‘Jean Turpin procureur de Geoffroy de St Germain, présenta un appointement fait et passé devant Philippot Avesgo et Morisset Marays, tabellions à Escouché’[13]. Comme Vrigny est très proche d’Ecouché, on peut se demander si celui de 1475 n’est pas le même personnage que celui de 1484 ?
Encore le même, où peut-être un fils ou un neveu, est cité par Victor Des Diguères[14] à propos d’une affaire intervenue trois décennies plus tard : « Vers la fin du XVe siècle, nous trouvons Guillaume Le Queu, écuyer, seigneur de la Queurie et de Ménilglaise, Le 2 janvier 1519, ses deux fils, Fouquet et Gervais, terminèrent, devant Pierre Leclerc et Philippot Avesgo, tabellions jurés au siège d’Écouché, une longue contestation, ayant pour objet principal le droit de pêche sur la rivière d’Orne. ». Il est possible que ces tabellions appartiennent à la même souche que les Avesgo anoblis, mais pour l’instant nous n’avons rien qui permette de l’affirmer.
Aujourd’hui le nom Avesgo est pratiquement disparu
Avesgo est un patronyme plutôt rare dont nous ne connaissons pas l’origine. Il semble qu’il ait pratiquement disparu aujourd’hui en France. Autrefois, on le rencontrait principalement dans l’Orne et un peu dans le Calvados. Ainsi, en dehors des individus dont il est question précédemment, il arrive de trouver des Avesgo ou Lavesgo dans les registres anciens, comme par exemple dans ceux de Saint-Aubin-d’Appenai (XVIIe siècle), mais aussi à Trun et Tournai-sur-Dives (XVIIe et XVIIIe s.) et quelques-uns également à Falaise (XVIIIe au XXe s.). La parenté entre tous ces personnages est plausible, y compris avec les anoblis et les tabellions, mais l’ancienneté insuffisante des registres, notamment paroissiaux, ne permet pas de l’établir.
Quant aux toponymes, il existe un lieu-dit L’Avesgo à Saint-Aubin-d’Appenai ; et au moins deux rues, une à Alençon, l’autre à Argentan, ont porté le nom d’Avesgo.
Pour la rue d’Alençon, le nom aurait été octroyé après qu’un d'Avesgo eut donné, vers 1863, un terrain qui séparait les rues de la Mairie et du Val-Noble, sous les conditions qu'une rue les réunissant serait construite et que le Val-Noble recevrait le nom d'Avesgo[15]. Elle est redevenue rue du Val noble en 1949. Le donateur en question est probablement Jean Gilles François d'Avesgo d'Ouilly, époux de Angélique Renée Henriette Le Mouton de Bosideffre, décédé le 8 février 1863 à Alençon à son domicile, dans la rue qui portait alors son nom.
La rue d’Argentan était la rue de Baillive ou Avesgo, en 1120. Elle serait devenue la rue de Madame-la-Baillive, en 1693, puis aurait repris le nom de rue Avesgo, entre 1755 et 1794, pour devenir rue Traversière jusqu'en décembre 1924, date à laquelle le conseil municipal lui attribue le nom actuel de rue Pierre-Ozenne[16].
Écorches, lieu-dit : Beaufour. Manoir élevé au milieu du 16e siècle, ayant appartenu en 1674 à André d'Avesgo, seigneur des Lignerits.
(c) Région Normandie - Inventaire général[17]
« Anobli aux francs fiefs » : origine et portée de l'expression[18]
Dans de nombreuses études sur la noblesse en Normandie et sur le régime des fiefs on trouve cette expression comme élément de justification de la qualité de noble.
Le terme même de « franc-fief » se rattache à des notions de base du droit des fiefs : il désigne le fief, terre noble, qui a été acquis par un roturier qui, par définition, n'est pas susceptible de remplir les obligations militaires incombant à un noble. Cette détention d'un fief par un roturier peut être autorisée par le seigneur moyennant une indemnité conformément à un système analogue à celui de l'amortissement. Le progrès de l'autorité royale a fait considérer l'anoblissement comme une prérogative royale rattachée au domaine. Ce point est important en Normandie en raison de la liaison résultant de la coutume entre la qualité noble d'un fief et la noblesse de son détenteur.
La guerre de Cent ans a amené de graves destructions de châteaux et des déplacements de population et, en fait, des roturiers ont souvent participé aux opérations de guerre ainsi que vécu noblement pendant les trêves ou pendant la paix relative. Le roi Louis XI décide de faire procéder à des recherches des nobles par des commissaires qu'il désigne. Tel est le cas pour la recherche de Montfaut. Celle-ci conclut à la radiation de la classe nobiliaire de nombreuses personnes, faute par elles d'avoir pu produire des actes justifiant leur qualité. De là de nombreuses protestations qui aboutissent peu après un voyage du roi en Normandie, à des lettres-patentes connues sous le nom de « charte générale des francs-fiefs », dont le texte peut être trouvé dans les Ordonnances des rois de France, tome XVII. Les ouvrages et recueils du XVIIe et du XVIIIe siècle ne la reproduisent pas car elle a été abrogée depuis 1569 après avoir été prolongée deux fois de trente ans.
Le texte contient un rappel précis des dommages de toute sorte résultant de la guerre et permet aux commissaires désignés de reconnaître la qualité de noble aux détenteurs de fiefs apportant la preuve de leur détention ancienne et de leur vie « noble ». La formule très large permet non seulement la reconnaissance de la noblesse à des roturiers détenant des fiefs mais aussi à des nobles d'ancienneté qui n'ont pu présenter d'actes en raison des troubles. Ce cas est assez fréquent car on voit dans des recherches de noblesse ultérieures, des nobles apporter des preuves que leur ont fournies des parents demeurant dans d'autres provinces. Néanmoins la mention « anobli aux francs-fiefs » est souvent considérée comme démontrant l'origine roturière de la personne concernée. Il est difficile d'apprécier le montant fixé par les commissaires pour l'indemnité à verser à la communauté d'habitants où ils seraient assujettis à la taille. Il semble que l'ancienneté de détention des fiefs ait été prise en compte ainsi que l'ancienneté du comportement comme noble (participation à des opérations militaires). Une mesure analogue a été prise par le roi en faveur des personnes de main morte qui n'avaient pas demandé d'amortissement d'acquisitions en raison des troubles. On ne connaît pas de mesure générale analogue dans d'autres provinces, la condition des nobles étant spécifique à la Normandie. C'est une mesure prise après la Ligue du Bien public pour rallier définitivement les Normands.
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Pour compléter sur les anoblissements, l’introduction du Nobiliaire de Normandie, de O'Gilvy [19], propose un chapitre concernant les recherches juridiques de noblesse où sont précisées les conditions d’acquisition du statut de noble au fil du temps. Concernant la recherche effectuée par Monfaut, l’auteur note ‘On a reproché à Monfaut d’avoir fait anoblir par la charte de 1470, la majeure partie de ceux qu’il avait déclaré usurpateurs. Le fait est vrai ; mais on doit convenir que ce précédent, nécessité par les influences particulières, ou par les besoins financiers de l’état, devint ensuite un usage général qui subsista jusqu’à la Révolution’[20].
[1] Le tableau a été modifié pour son propriétaire en rajoutant au fil du temps sur son portrait de jeunesse ses récompenses, l'ordre du saint esprit en 1814 puis l'ordre du Lys en 1824.
[2] Au sens notarial du terme : la collation est l’opération qui consiste à comparer l'original d'un acte avec sa copie, pour s'assurer de la parfaite concordance des deux textes.
[3] A. D. Calvados : 39F - Fonds Deshais de Forval / Alliance d'Avesgo du Valheureux (Argentan) 39F7
[4] Gallica, Nouveau d'Hozier. Auzaneau-Azincourt, vue 195.
[5] L’intendant Bernard de Marle fut chargé en 1666 de la recherche de la noblesse de la généralité d'Alençon.
[6] Gallica, Nouveau d'Hozier. Auzaneau-Azincourt, vue 192.
[7] Gallica, Nouveau d'Hozier. Auzaneau-Azincourt, vues 188-190, 210.
[8] Nobiliaire de Normandie, publié par une société de généalogistes, avec le concours des principales familles nobles de la province. Tome 1, 2e partie, Tablettes généalogiques, sous la dir. de Edouard Drigon, comte de Magny, Paris, 1863, pp. 179-185.
[9] Dictionnaire des familles françaises anciennes ou notables à la fin du XIXe siècle, Tome 2e, AUB-BAR, Gustave Chaix d'Est-d'Ange, 1904, pp. 130-131.
[10] La vie de nos pères en Basse-Normandie, notes historiques, biographiques et généalogiques sur la ville d'Argentan, Victor Hyacinthe Guyon des Diguères, 1879, pp.50-51.
[11] En ligne sur le site des AD Orne.
[12] Gallica, Carrés de d'Hozier 47. Auzan-Avesgo, vue 364.
[13] Histoire généalogique de la Maison de Harcourt, Tome 1, Gilles-André de La Roque, 1667, p. 849 (948/1136)
[14] Victor Hyacinthe Guyon des Diguères, opus cité, p. 131.
[15] La Commune d'Alençon : histoire de son administration municipale de Louis XI à la Révolution, Adhémar Leclère, Paris, E. Leroux éd., 1914, p. 8
[16] Ouest-France, 28 février 2015.
[17] Région Normandie, Inventaire général.
Immatriculation IVR25_19816100272X, communication libre, reproduction soumise à autorisation, date de prise de vue 1981.
https://inventaire-patrimoine.normandie.fr/dossier/manoir/4295b7fb-9b74-413e-9aa4-b02f1b9fa2c2
[18] Reulos Michel. Extrait de : Annales de Normandie, 46ᵉ année, n°5, 1996. Société d'Ancien Régime : Journée d'Histoire du Droit - 1995. pp. 741-742.
[19] Nobiliaire de Normandie, vol. 1er, Gabriel O'Gilvy, Londres, 1864, p. XVI à XXXI.
[20] Même source, p. XVII.



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