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mardi 27 décembre 2022

Onomastique : Les Sagehomme de Lignières-la-Doucelle sont devenus des Lesage

Ceux qui font des recherches généalogiques savent que plus on remonte dans le temps, plus on rencontre des variantes orthographiques sur les noms de familles. Parce qu’avant le XIXe siècle, dans un monde où peu de gens étaient alphabétisés, les rédacteurs des actes n’avaient souvent guère d’autres solutions que d’écrire comme ils entendaient. Alors, pour peu que l'on change de paroisse, ou que le scribe ne soit plus le même, les fantaisies orthographiques se multiplient. On finit malgré tout par s’y retrouver, car la phonétique des noms reste la même, ou presque. Il est possible de rencontrer ainsi dans la Mayenne et l'Orne, indifféremment pour une même personne : Derouet ou Drouet, Gadois ou Gadouas, Belin ou Blin, etc. D’où peut-être l'aphorisme : ‘les noms propres n’ont pas d’orthographe’.

Toutefois les transformations patronymiques ne sont pas toujours aussi évidentes, comme le montre l’exemple du nom Sagehomme à Lignières-la-Doucelle.

Le 11 juin 1675 à Lignières-la-Doucelle, Nicolas Sagehomme épouse Marguerite Chevreuil[1]. Nicolas est le fils de Robert Sagehomme et de Jeanne Boismale. Ses grands parents sont Nicolas Sagehomme et Marguerite Coulbault.

Nicolas Sagehomme et Marguerite Chevreuil vont avoir au moins quatre enfants, Catherine, Robert, Nicolas et Julien, nés entre 1676 et 1685. Tous portent le nom Sagehomme dans leur acte de naissance.

Mais un quart de siècle plus tard, les choses changent. Le 8 février 1712, le troisième enfant, Nicolas, épouse Marie Broussin à Lignières-la-Doucelle[2]. Sur l’acte on peut lire qu’il est assisté, entre autres, de Robert et Julien Sagehomme, ses frères. Or, il se trouve que Nicolas, le jeune marié, et Robert son frère, ont apposé leur paraphe. Et si Nicolas signe nSagehomme, son frère, Robert signe R lesage !

Pourquoi Robert Sagehomme a-t-il transformé son nom en Lesage ? Difficile à dire, alors que son frère Nicolas continue à utiliser son nom d’origine.

      Continuons : 

         Le 28 février 1726 à Lignières-la-Doucelle, Marie Gérard se marie avec Jacques Huchet. Marie est la fille de Jacques Gérard et de Catherine Sagehomme (première enfant du couple Nicolas Sagehomme-Marguerite Chevreuil). Sur l’acte de mariage Marie Gérard, l’épouse est dite fille de défunte Catherine Lesage[3]. Là aussi, le nom est donc maintenant transformé.

 Le 22 octobre 1731 à Lignières-la-Doucelle, Robert Lesage, fils de feu Nicolas et défunte Marguerite Chevreuil, épouse Barbe Cochin[4]. Cela est conforme avec la signature de ce même Robert, et confirme donc celle de 1712 qui n’est plus Sagehomme. Mais son frère Nicolas paraphe également l’acte, et il signe désormais nlesage.

 Le 31 janvier 1735 à Lignières-la-Doucelle, Marie Lesage, fille de Nicolas et Marie Broussin, épouse François Jouanne[5]. Sur l’acte Nicolas, le père de l’épouse, et Robert son oncle, continuent à parapher nlesage et R lesage.

C’est ainsi, qu’au début du XVIIIe siècle, le patronyme Sagehomme a disparu à Lignières-la-Doucelle au profit de celui de Lesage, sans que l’on puise pour l’instant en fournir l’explication.

Le fait que les Sagehomme paraphaient ne signifie d’ailleurs pas nécessairement qu’ils savaient écrire, ils pouvaient juste savoir reproduire leur signature. Mais cela n’explique pas la transformation du patronyme. Et le fait que les deux frères, Robert et Nicolas, n’aient pas changé leur façon de signer en même temps épaissit un peu plus le mystère.